smart building

Le smart building, tout le monde en parle mais personne ne l’explique. Entre les services, les technologies et les risques, difficile d’y voir clair. Je propose de faire le point sur les réels enjeux du Smart Building pour le digital.

Aujourd’hui le mot « Smart Building » ou « bâtiment intelligent » est sur toutes les langues. Chaque entreprise avance sa vision et ses propositions smarts. Les uns avanceront les aspects énergétiques, les autres les aspects architecturaux ou les aspects écologiques. Finalement l’adjectif « intelligent » est suffisamment large pour inclure beaucoup de bonnes choses, mais il est difficile de faire une définition du « Smart Building » qui conviendrait à tout le monde.

Pour C2S Bouygues, entreprise de services numériques, le smart building a forcément à faire avec des services digitaux. Au côté de Bouygues Construction depuis 2005, nous accompagnons la réalisation de smart buildings. Depuis cette date, nos experts ont su acquérir une large expérience du sujet et ont construit une vision solide des possibilités pour les différents ouvrages. Je vais faire le point sur notre vision du Smart Building et de tous les avantages et les prérequis qu’elle traduit.

Le digital chamboule déjà le quotidien de tous, ne serait-ce que par l’apparition constante de nouvelles applications sur smartphones. Les plus gros capitaux boursiers du monde sont aujourd’hui représentés par les GAFAM, les premiers fournisseurs de services digitaux. L’évolution constante de ces innovations se fait au moins aussi vite pour l’apport de nouveaux services aux usagers de bâtiments. Il ne s’agit pas ici de détailler tous les services que l’on serait capable de proposer mais d’avantage de tirer les grandes tendances communes aux différents types d’ouvrages. Car il faut comprendre que derrière le terme « bâtiment » peut s’y trouver : une école, un hôpital, un stade, un centre commercial, un aéroport, un hôtel ou autre. Et que, ayant conçu divers projets, les services apportés y sont complétement différents. Un étudiant n’a pas les mêmes besoins qu’un patient dans un hôpital ou qu’un passager dans un aéroport.

Le parcours digital du visiteur : L’usager au cœur de la stratégie

Quoi de mieux que d’expliquer les apports d’un smart building exclusivement du point de vue de ses usagers. C’est le parti pris de C2S qui développe le parcours digital du visiteur. Pour répondre aux appels d’offres, il explique le changement des quotidiens au travers de scenarios : Dans un lycée, un professeur a besoin de changer l’heure de son cours. Il réserve une nouvelle salle au nouvel horaire, une notification est envoyée sur les téléphones des étudiants concernés pour les informer. Si ces derniers sont indisponibles, ils pourront récupérer la vidéo du cours qui sera filmé, ou pourront le suivre en direct à distance depuis chez eux. Le panel de services digitaux que l’on est capable de proposer est quasi-infini, sachant qu’il se décline selon le type d’ouvrage. Il s’agit de garder les services les plus pertinents d’un point de vue usage, économique et surtout ceux qui sont techniquement viables. Nos équipes embarquent une expertise technique qui valide la faisabilité et estiment le coût qu’une solution peut engendrer et il faut dire que nous constatons beaucoup trop de fausses promesses sur le marché.

Le parcours digital du visiteur nous permet de déployer les possibilités du marché. La reconnaissance faciale, l’exploitation des réseaux sociaux… Pour l’usager, on est dans l’optique de proposer le bon produit à la bonne personne. Si un passager a ses habitudes, comme de prendre un café avant de prendre l’avion il est pertinent de lui en faire la promotion. On est dans la logique des Customer Relationship Management (CRM). Il faut même aller plus loin. Si je prends l’exemple des salles de concerts, des algorithmes sont capables de définir le meilleur prix de vente des tickets en fonction de la popularité de l’artiste, de la date, de la météo, etc. Ils s’occupent aussi, entre autres, de l’approvisionnement des produits de ventes qui doivent être proposé durant l’évènement. On évitera ainsi de proposer des crèmes glacés aux concerts de rap et des bières aux spectacles pour les enfants. L’ensemble des capteurs existants nous permet de récupérer beaucoup de données, on peut même parler de Big Data. Celles-ci sont exploitables pour y associer de l’intelligence artificielle, des algorithmes d’apprentissage comme des réseaux de neurones profonds (deep learning).

Mais attention aux cas européens, il y a désormais le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD). Dans le cas où l’on récupérerait de la donnée personnelle, il est impératif de l’anonymiser. C’est-à-dire faire techniquement en sorte qu’il soit impossible de retrouver l’identité de l’individu à partir des données récoltées. Ce sujet est critique pour la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) qui fait souvent la démonstration de sa capacité à détecter rapidement les manquements à la RGPD. C2S sait accompagner sur ces sujets. La RGPD est appliquée en Europe mais beaucoup d’autres pays s’en inspirent pour leurs propres règlements et ainsi éviter la réalisation prophétique du roman 1984 de George Orwell.

Localisation en intérieur : le service vient à vous

Une des données anonymisée facilement récupérées serait la localisation des usagers dans le bâtiment. Très facilement récupérable, ne serait-ce déjà que par le Wifi. Aucun besoin de connexion, si votre téléphone détecte la borne Wifi c’est que celle-ci détecte aussi votre téléphone et donc (in)directement votre localisation. A partir de là, l‘avantage est d’apporter le service à l’usager. Fini les temps d’attente à la buvette à la mi-temps, en donnant votre localisation, on peut vous apporter votre boisson à votre place sans que vous ratiez le match. Au vu de tous les avantages qu’elles fournissent, ces technologies se sont développées aux points de devenir des incontournables pour les bâtiments qui reçoivent du publique, vous obtiendrez une carte temps réel de votre position et l’exploitant la densité de visiteurs dans le bâtiment.

L’exploitation du bâtiment : le réseau comme orchestre du bâtiment

Parlons maintenant des apports du smart building pour l’exploitant du bâtiment. L’ensemble des capteurs du bâtiment permettent d’orchestrer un jumeau numérique, la reproduction virtuelle du bâtiment sur laquelle on peut visualiser ces données capteurs. On parle alors de Building Operating System (BOS), le système d’exploitation du bâtiment. Il existe déjà beaucoup de solutions que Bouygues Construction a su très vite intégrer. L’exploitation est simplifiée, tous les capteurs sont centralisés, on y commande les lumières, la climatisation, les stores, les accès, les présences. Surtout que le réseau tend à absorber de plus en plus d’équipements, certaines entreprises promettent même d’y intégrer la distribution lumineuse du bâtiment. Une bonne infrastructure, redondante à la panne et évolutive, est donc indispensable.

Infrastructure réseau : le socle de tous ces services

On a parlé service mais qu’en est-il de l’infrastructure ? L’infrastructure supporte tous ces services aux usagers. Il faut bien sûr avoir une bonne vision stratégique quant aux choix de l’architecture technique et des équipements qui la composent. Il faut sortir de la logique « d’acheter du switch au kilo » qui est trop souvent le premier réflexe et dimensionner des bons équipements en fonction des services souhaités. Cela n’est pas chose facile. Les principaux constructeurs comme Cisco, HP, Huawei pour ne citer qu’eux, réinventent sans cesse la technologie. Quand on ajoute à cela le fait que tous les équipements du bâtiment tendent à s’intégrer au réseau comme la vidéo surveillance, le contrôle d’accès, etc. on comprend vite que l’accompagnement d’experts est un critère nécessaire de réussite.

Il existe des labels spécifiques comme WiredScore ou le label Ready2Services (R2S). Ces labels traitent uniquement la partie infrastructure, le bâtiment est « prêt à recevoir du service » comme l’exprime le sigle R2S. Ils ne tiennent pas compte des services que le bâtiment intégrera. Ces labels font la description d’une infrastructure qui suivrait les bonnes pratiques. Un réseau qui doit être unique, convergeant, évolutif, embarquant des mécanismes de continuité de service et d’autocicatrisation. Pour le métier, l’apparition de labels est toujours une bonne nouvelle car ils valident de bons choix. Selon moi, ces labels gardent tout de même deux défauts. Le premier est qu’ils ne sont pas assez exigeants, même à leur plus haut score ils ne font que traduire une infrastructure standard. Nous avons l’habitude de dépasser ce niveau d’exigence. Le second est leur pérennité dans le temps, au vu de l’évolution de la technologie, on peut se poser la question de l’obsolescence de certains critères demandés. Ces deux points mis de côté, ces labels sont à conseiller car ils préconisent une infra solide, performante et surtout, le plus important, sécurisée.

Cybersécurité : se défendre contre la criminalité de notre temps

Les entreprises ayant malheureusement vécu une attaque ont bien compris que la cybersécurité n’est pas un coût mais bien un investissement. Vous ne pouvez pas faire l’économie d’une infrastructure sécurisée et vérifiez que chaque service supporté par le réseau n’engendre pas de risques. C’est la première contrainte lorsque l’on conçoit son infrastructure. C2S dispose une équipe de cybersécurité prête à réaliser, en plus de conseils, des tests de pénétration ou « pentests ». Il s’agit de mandater des pirates informatiques professionnels pour attaquer le réseau et en détecter les failles. Une infrastructure neuve est forcément réfléchie pour être impénétrable mais quand celle-ci s’appuie sur une infra déjà existence, le risque de failles augmente. Les nombreux audits réalisés démontrent que beaucoup d’infrastructures sont encore trop vulnérables, une expertise de cybersécurité sur le réseau du bâtiment est indispensable.

En résumé, vous avez ici toutes les clés pour comprendre les enjeux digitaux du smart building. Ce texte synthétise les différents points majeurs qu’il faut avoir en tête lorsqu’on parle de smart building. Cela mériterait de décliner les possibilités pour chaque type d’ouvrage. J’espère au moins avoir su expliquer clairement les enjeux du digital dans le smart building, que les services sont innovants mais qu’il faut garder en tête que toutes les technologies ne sont pas fiables et que l’on trouve trop de mauvaises promesses sur le marché. Ce métier a encore de beaux jours devant lui, les forts enjeux déjà présents ne cessant pas d’augmenter. Vous l’aurez compris, on parle bien ici de futur

Hugo Martin, Consultant expert en Smart Building & Smart City